mercredi 19 octobre 2011

Broderie sur une interview de Jacqueline Cimaz à Radio des Boutières

1 - Pourquoi avez-vous choisi de proposer un débat sur le numérique?
Cela fait plus de 30 ans que, dans des cadres divers,  je travaille sur ce sujet. Aujourd’hui, tout s'accélère,  des changements en cours  – comme la numérisation du cadastre -  à la  multiplication des connaissances mondiales...

Appréhendées par le numérique et liées à lui, les recompositions territoriales, les métropolisations inquiètent.

Leibniz est considéré comme le dernier  à avoir maîtrisé l’ensemble des connaissances de son époque. Quelle place de la personne dans cet univers de moins en moins accessible et maîtrisé, où,  pourtant,  Google Map vous donne l’impression d’avoir votre territoire en main ?

Il faut que les gens aient un minimum d’appréhension de l'ensemble des bouleversements en cours pour pouvoir  participer, intervenir  dans les choix à faire, les décisions à  prendre.



Esther Salmona   parle d’une lecture « spatialisée » et précisant les lieux de prise de sons, vous plonge dans le paysage sonore authentique d’une métropole.    
                
« Être dans le paysage et le dire. Où se situe le lieu d'une écriture de l'espace perçu mais aussi de l'espace mental, intérieur, issu de la perception, des sensations ? Comment l'espace d'une phrase rencontre l'espace autour, devient l'espace autour ? Et comment l'espace autour est, devient l'espace du texte ? » demande-t-elle, citée par Pierre Ménard. 

D’Esther Salmona, voir les carpophores,  découvrir sa carte des flux audios,  et , locus sonus  et si vous êtes allés dans une des grandes villes cartographiées comme J.Cimaz  à Hong-Kong, écoutez de la fenêtre de son studio ses flux sonores et audios  comme si vous y étiez. 



Il faut aussi pouvoir éviter la coupure générationnelle. Et tout le travail fait sur la patrimonialisation à St-Apollinaire-de-Rias, dont nous avons déjà parlé,   va dans ce sens : on peut produire des connaissances, les faire connaître et partager par Internet sans maîtriser le traitement de texte...  Les apprentissages peuvent venir  après. Leur communication, leur mise en débat peuvent être à l’origine de nouveaux projets concernant la vie du territoire (On l’a vu au Mézenc, avec "Le Fin Gras")



2 - L’opération va se décliner avec plusieurs actions, parlez-nous de l’action menée auprès des scolaires


2.1. D’abord le passé : un travail en 2009-2010 sur Media en quête d’identité  - le livre numérique – en différenciant clairement   « numérisé » et « numérique ». Notre travail porte essentiellement sur la spécificité de l’écriture numérique – et de sa lecture - ce qui touche la création mais aussi les apprentissages scolaires et sociaux.  Cela s’est fait dans le cadre de la Fête de la Science donc, mais aussi de la  Fête de l’Internet...  en liaison  même avec le Printemps des Poètes.
Il s’agissait essentiellement de textes, d’images – fixes ou mobiles- de sons - ce qui requiert la maîtrise de ces lectures, mais surtout l'apprentissage de la composition ou  programmation ou orchestration de ces divers éléments composites pour faire sens - donc d’un autre niveau de complexité.


2.2.  le concours vidéo - en partenariat Bibliothèque PAPI/Association Les Rias avec le CIAS -  la réponse du Collège Pierre Delarbre de Vernoux. Une   très riche  réalisation de cinq élèves  -avec Mme Véronèse, documentaliste - montrant  en 2 mn toutes les contradictions vécues,   les aspirations et  le choc de réalités...  


2.3. Il s’agit de poursuivre dans cette voie avec de nouveaux outils numériques-  les acquis techniques du workshop- mais aussi avec ces acquis théoriques qui se dessinent au travers de sa préparation, de son vécu, des lectures qui l’accompagnent... L'apport de Pierre Ménard...


3 - Pensez-vous qu’il  soit important d’impliquer les jeunes dans ce type d’opération, pourquoi ?


Bien sûr ! Ils sont nés à l’ère du numérique,  vivront  et travailleront  dans un cadre que nous ne pouvons imaginer, exerceront des métiers n’existant pas à ce jour.  Il est essentiel qu’ils soient associés à la définition et à la construction de leur avenir et devenir...



4 -Parlez-nous du débat qui se tiendra ce soir à partir de 18 h, de quoi s’agit-il ?


Il s’agit déjà d’approcher à diverses échelles les relations entre numérique et territoire, numérique, territoire et lieu, à partir de trois logiciels et de deux films :

- Google Map ou Earth puis Google Street View- où on voit un point sur la carte, puis sa maison, sa voiture, en plan puis en photo(s)... Ce qui pose aussi la question de la vie privée et de l’identité.

- Un problème qui sera aussi à  aborder  à partir de « La jetée », le  film de Chris Marker, très dur. Mémoire – récurrence et évanescence de l’image,  temps et identité dans la durée.

- Et puis à partir de la vidéo des collégiennes, en prise sur le réel et ses contradictions.



« Google Street View est un révélateur de notre expérience du monde, et en particulier, de la paradoxale tension entre notre indifférence quotidienne aux choses qui nous entourent et notre incessante recherche de connexion et d’interaction. »



« C’est vous qui avez photographié ? » demandera Paulette le lendemain. 
Le satellite reste trop abstrait.
Lieu et territoire confondus  à la jointure de l’espace et du temps, de la mémoire et de la fiction.

« Les photographies aériennes nous donnent un accès indiscret aux lieux inaccessibles ou interdits de la ville, écrit François Bon, décalent notre vision de la ville ordinaire. C’est depuis ce moment que j’associe ces images à des bribes de fiction qui s’autorisent le fantastique, et recomposent à leur tour une autre ville. » Cité par Pierre Ménard



...et là, l’identité – un réseau évoluant dans l’espace et le temps et dont participent  les identités numériques de chacun.  « J’ai 3 chat... Mon père et ma mère ce dispute, hiere soir il  mon dit que... »  Une identité numérique qui n’a rien de virtuel et se trame à la vue de tous... De plus, géolocalisable...


« Dans la ville numérique, écrit Boris Razon (Télérama n° 3179-3180), les gens produisent une narration qui raconte l’usage, l’histoire ou encore la mémoire de la ville. Ce qui est nouveau et puissant, c’est l’articulation des trois : la ville, son double numérique et les réseaux sociaux. »   (Cf le blog "Au lieu de se souvenir") 
 et de l'expérience.

5 – Que va-t-il se passer samedi ?


Workshop :  prise de vues et sons puis  montage.

 Des choix et décisions à tout moment,  appareil en main.
 La sérendipité ? Ou saut d’un domaine à un autre avec armes et bagages (théoriques et  vécus ). (Un bel exemple lors de la collecte avec l’insistant herbier de Paulette : du jardin parcouru par le satellite à l’herbier intérieur et singulier – celui  de St-Apo n’est pas celui du Mézenc, nous dira-t-elle. Des marques précises, construites et dites, identifiantes, de l’identité de lieux précisés, appropriés )

« Être dans le paysage et le dire. » dit Esther Salmona à Barnave.

Karl Dubost précise  dans Au lieu de se souvenir :

 « La transmission du lieu implique la narration, qui elle-même prend corps dans la voix des hommes. Nous n'étions pas là, nous n'avons rien à transmettre, nous ne pouvons plus recevoir. Les voix sont éteintes, ( La Jetée  ) les histoires ont été avalées et avec elles, les mémoires. Au lieu de se souvenir, il nous reste l'empreinte numérique qui disparaîtra un jour de ces histoires semi-figées d'un passage dans une ville. »  


Destruction des vieux quartiers de Pékin, destruction d’une ville par le tsunami au Japon... 



6 – Comment va se dérouler la matinée de dimanche 16 octobre ?


Synthèse et perspective – Un travail qui concerne les acteurs pour penser l’achèvement et la communication des outils construits et la poursuite des apprentissages, investigations et partenariats...

7 - Est-il important de sensibiliser le public aux thèmes que vous abordez dans ces actions, pourquoi ?


Parce que c’est leur vie, le devenir, la santé aussi ... Bien au-delà du B2i collège, cf les applications médicales,  les prothèses, et l'intérêt récurrent à ce jour, pour les ondes cérébrales... Des questions émergentes... La nécessité de la veille, des recherches scientifiques et du débat... Et des moyens du débat...




8 - Cela fait maintenant plusieurs années que vous êtes porteur de projet de la fête de la science, évènement coordonné par L'Arche des Métiers, que pensez-vous de cet évènement ?


Qu’il est indispensable, qu’on ne fait pas assez de place aux sciences et aux mathématiques dans ce pays, mathématiques dont le pouvoir est immense   cf  la découverte de corps chimiques (tableau de Mendéléiev) – ou de planètes...- par le calcul -  bien avant qu’on ait pu en observer des images ou des sons qui confirment.

Le numérique, ce sont des calculs, partout...

On pourrait d’ailleurs évoquer l’origine commune des la philosophie et des mathématiques, les liens entre poésie et mathématiques...

Carrefour des sciences et techniques où les  techniques permettent aux sciences d’avancer et où les sciences sont à la source des  techniques... Ce qu'avait posé Michel Schlenker, physicien, lors de la première Fête de la Science des Rias, portant sur le magnétisme.

Ancien "enfant juif" caché à Saint-Apollinaire-de-Rias, il avait d'ailleurs tenu à couper son exposé par le rappel de cet accueil. La citoyenneté de la "désobéissance civile"...

Les investigations effectuées aujourd'hui mettent plus que jamais en relief, l'importance de la réflexion, de l’humain, de la citoyenneté et pour ce faire de la formation, de la veille, des échanges,  et de la recherche...

A souligner, en la matière,  le rôle de l’Arche des métiers et la qualité pédagogique et scientifique de ce qui s’y passe. Son importance et son attractivité pour les enfants (et les Autres)...











Se jouer des limites ou dépasser les bornes ( ou hommage à Marie Curie ? ) ...









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